Robbie K Backstory FR - Les Rats Explosifs


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Lonares
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Aujourd'hui, je suis mort. Ça vous fait une belle jambe, hein? Hahaha! Mais attendez de savoir la suite, vous allez trouver ça plus pathĂ©tique encore! Si seulement vous le voulez, pas sĂ»r. Car les gens veulent entendre de belles histoires de types braves, remplis d’un amour qui leur a donnĂ© la force d'affronter tous les dangers, qui leur a apportĂ© la gloire et la richesse, un happy ending. Personne veut connaĂźtre l'aut' cĂŽtĂ© sombre! Celui des malheureux qui dĂ©barquent de rien et finissent en rien. Les rejetons de la sociĂ©tĂ© comme moi. Les tristes vĂ©ritĂ©s que personne ne veut voir. Si ça peut vous rassurer, j'ai de belles histoires d'amour Ă  vous raconter! Des histoires qui m'ont donnĂ© une force et un courage incroyables! Mais qui ont aussi causĂ© ma perte. Eh oui, la ligne entre la force et la faiblesse de l'amour est Ă©troite et fragile
 Parfois on croit que quelque chose est dur comme un pont de mĂ©tal
 Mais c'est en rĂ©alitĂ© cassant comme un fil.

Je suis nĂ© dans une famille vraiment pas terrible. Enfin, idĂ©ale si mon ambition avait Ă©tĂ© d'ĂȘtre une petite fille blonde parfaite, bien croyant, qui obĂ©it au doigt et Ă  l'Ɠil et qui donne la patte. Sauf que moi, j'Ă©tais plutĂŽt du genre Ă  mordre, si vous voyez ce que je veux dire. J'Ă©tais un rebelle dĂšs tout petit, mes parents on jamais rĂ©ussi Ă  me coller Ă  leur image! Et peu importe s'ils me dĂ©testaient pour ça. Je serais la personne que j'ai envie d'ĂȘtre, pas celle qu'ils ont dĂ©cidĂ© pour moi! C'Ă©tait dĂ©jĂ  pas la joie, mais ça a encore plus dĂ©gringolĂ©. La musique, le punk, c'est satan! Je suppose que j'suis un hybride malĂ©fique alors, parce que je suis fait pour tenir ces baguettes et faire raisonner ma batterie Ă  travers les murs. Ouaiiis, quand j'disais que je serais qui je veux, j'parlais en tant que personne, pas en tant que comme les vieux l'entendent. "Tu veux ĂȘtre qui plus tard? Quelqu'un d'important j'espĂšre?" Quoi, je ne suis pas important lĂ  tu m'dis? Le monde a de drĂŽles de prioritĂ©s et j'ai pas envie de m'y plier. J'emmerde ce systĂšme! 

Arriva ce qui devait arriver, mes vieux ont fini par me jeter aux ordures, accompagné de ma batterie. Est ce qu'ils en ont juste eu marre de mon boucan du diable? Ah! Si seulement. Il a fallu que je sois trans aussi, ça, c'était trop pour eux. Tant pis, c'est ainsi que Robbie déguerpit!

J'pense qu'on a tous dĂ©jĂ  rĂȘvĂ© de vivre d'amour et d'eau fraiche comme on dit. Ou p'tet que c'est juste moi? Hah! Autrement dit, se barrer dans la cambrousse et vivre de ce qu'on vole ou cultive. Fantasme porte bien son nom car s'en est un, tout paraĂźt plus simple une fois racontĂ©. Combien de fois j'me suis retrouvĂ© sans toit, a fuir les clodos, a dormir dans la merde et l'humiditĂ©, et le froid? Et si j'appellais Ă  la charitĂ©, qui voudrait d'un punk trans? Personne, mĂȘme mes propres vieux en ont pas voulu. Qu'ils aillent au diable comme ils me le prĂȘchent! Une vie sans un sous est une vie qui peut chambouler Ă  tout instant, oĂč on est toujours au garde Ă  vous. Poulets, controlos, etc
 Le monde cherche a te faire cracher un max de thunes et quand t'en a pas, il cherche Ă  t'Ă©liminer comme une vache stĂ©rile. Heureusement je suis rusĂ© et habile, sans quoi j'aurais pas survĂ©cu. Et y'a un peu d'bontĂ© aussi je l'avoue, avec toutes ces assos et ces gens qui ont soit un sĂ©rieux besoin de booster leur Ă©go, soit qui veulent faire en sorte que ce monde soit un peu moins merdique. 

En parlant d'un peu moins merdique, il y a eu "lui". On y arrive, vous inquiétez pas ! Je continuais ma vie de vagabond malgré moi. Voyons le cÎté positif du merdier: j'ai découvert des horizons incroyables! C'est là que je l'ai vu, accoudé à son vieux tas de ferraille. Un gars costaud, un peu plus grand que moi (c'est pas bien compliqué, je sais, je sais!) Il était en train de fumer un pétard, et j'en avais justement bien envie.

Eh ouais. Comme Ă  la prĂ©histoire, tout Ă  commencĂ© avec du feu. Puis on a taguĂ© ensemble. J'ai l'impression qu'on a les mĂȘmes dĂ©lires! Et j'Ă©tais loin d'imaginer avoir rencontrĂ© mon Ăąme sƓur, moi, robbie le vagabond solitaire. 

L: "J'mappelle Leroy. Mes vieux m'ont tej de chez moi y'a quelques mois. Tss. Tout ce que je me demande c'est comment est ce que c'est pas arrivĂ© plus tĂŽt. J'ai pas sĂ» ĂȘtre leur "petite fille parfaite" si tu vois ce que je veux dire
"

R: "Un peu mon gars que j'vois c'que tu veux dire, il en va d'mĂȘme pour moi!"

L: "Ah ouais? Hahah! J'fais à moitié l'étonné, en vrai je m'en doutais un peu!"

R: " Tout ça parce que je suis un lutin des prés avoue! Pas d'passing pour robbie!"

L: "Hahaha nan nan mec juste une intuition."

Et c'est ainsi que j'ai rencontrĂ© mon frĂšre. On n'avait tous les deux pas de famille? “Fuck les liens du sang! On sera notre propre famille.” Lui et moi contre le monde entier! A bord de son vieux tas de ferraille, "son vieil ami rouillĂ©", le monde Ă©tait Ă  nous. 

Je me sentais tellement pousser des ailes que j'ai repris les Ă©tudes. Vous y croyez vous? Un punk convaincu qui va faire des petites Ă©tudes comme les gens normaux. Si on me l'avait dit y'a quelques annĂ©es, j'y aurais pas cru moi mĂȘme. Des Ă©tudes de chimie en plus, monsieur! Leroy m'a accompagnĂ© devant le bĂątiment pour mon premier jour. Avec sa dĂ©gaine de daron, il avait plus l'air de mon vieux que de mon frĂšre. 

L: "Bon courage, perle de mes yeux, ma goutte d'eau fraĂźche du Sahara."

Ah comme j'adorais ses disquettes. C'Ă©tait ses mots-doux signatures, aussi excessives qu'adorables.

Je l'enlace fort. Avant de partir, il me dit "Si y'arrive quoi que ce soit tu sais, tu m'appelles et je fais tout péter."

A son regard tendre, je savais qu'il ne plaisantait qu'à moitié. 

Je me suis rapproché de personne mais ça, fallait s'y attendre. Avec ma dégaine de ragondin terni et la leur de moutons ahuris, le courant passait pas. A la sortie, j'ai aperçu une fille en robe blanche, avec des docs noires et des cheveux courts rasés sur le cÎté. Un choix capillaire de grand style, je dois dire. J'ai pointé ma trombine devant la sienne, comme si je la connaissais depuis toujours, et elle m'a sourit. On a allumé une clope et on a parlé; on s'est tout de suite bien entendus. Décidément fumer ça a beau niquer la santé ça crée parfois des amitiés. Elle s'appelait Lither.

Leroy bossait tard en semaine et plus le temps passait plus on traĂźnait aux bars a se la mettre mauvaise juste parce que c'Ă©tait fun. Mais un soir, c'Ă©tait tellement fort que j'ai dĂ©gueulĂ© le fun au fond du trou. Je le disais Ă  personne, mais ça me permettait de tenir le choc face Ă  la dysphorie qui pesait en moi, et pire encore sur moi, sans parler d’à quel point ça me niquait le dos de compresser ce que je pouvais comme je pouvais. C’était terrible mais ça sera jamais pire que lorsque je m’en Ă©quipais pas. Plus le temps passait, paradoxalement, plus j’avais l’impression que quelconque opĂ©ration n'arriverait jamais. Quand je suis rentrĂ© dans le bar, Lither Ă©tait Ă©vanouie Ă  cĂŽtĂ© de son propre vomi entourĂ©e de mecs bourrĂ©s qui reluquaient son corps inerte. Je les ai menacĂ© avec ma voix grisante qui pĂšte les tympans et je l'ai traĂźnĂ©e dans un coin plus calme, elle respirait encore. J'ai appelĂ© les secours et je crois que je me suis Ă©vanoui aussi, parce que je me souviens plus de rien entre ce moment et celui oĂč je me suis rĂ©veillĂ© sur un lit d'hosto.

J'ouvrais peniblement les yeux sur une grosse femme qui arrĂȘtait pas de rĂ©pĂ©ter "les jeunes aujourd'hui, les jeunes aujourd'hui". Je vante pas mon mode de vie mais elle avait une tĂȘte Ă  sacrĂ©ment se faire chier elle, dans son quotidien. 

R: "OĂč est mon amie? Elle va bien?" 

"Chambre d'a cÎté", elle m'a lancé de maniÚre si agréable et loquace.

La lumiĂšre du couloir attirait mon regard et c'est lĂ  que je l'ai entrevu. Un beau morceau, ça oui. Mon coeur a palpitĂ© comme jamais, et c'Ă©tait pas la gueule de bois. Il devait ĂȘtre un peu plus ĂągĂ© que moi mais pas de beaucoup.

“Qui c'est?” J'ai lancĂ© a la vieille ourse.

-"Aide infirmiĂšre".

Bon c'était pas avec elle que j'allais en savoir plus. Lorsque j'étais de nouveau apte à gambader, je l'ai trouvé. 

"Des gens comme toi on en croise pas tous les jours! T'as un nom?" Je lui ai dit pour la toute premiÚre fois, d'un air faussement assuré.

"Je m’appelle Donny. Vous dites ça car j'ai les cheveux roses?" Il avait l’air amusĂ©.

R: "En partie, ouai. J'adore. Moi c’est Robbie."

D: "Merci. Vous avez du style également. Est ce que vous avez besoin de quelque chose?" 

J'aurais aimĂ© lui dire "t'emmener dans un foutu bar et perdre mon regard dans le tien", mais je pense que j'ai dĂ©jĂ  Ă©tĂ© assez lourd comme ça. Comment savoir quand il faut poursuivre ou s'arrĂȘter? Si on est lourd ou qu'on lui plait bien face Ă  des rĂ©ponses aussi impassibles? 

Puis soudain, j’ai trouvĂ© LE sujet. Bingo !

R: "Mon amie qui est alitée ici aussi fait des études d'infirmiÚre. Elle est seule au campus, à part avec moi. Je pense que vous pourriez bien vous entendre, et causer études."

D: "Oui, pourquoi pas." 

On est allĂ© chercher sa chambre et on a papotĂ© tous les trois. Le courant Ă  l’air de bien passer.

AprĂšs quelques jours, je suis finalement rentrĂ© dans mon taudis prĂ©fĂ©rĂ©, Leroy n'Ă©tait pas lĂ . Je me suis dit qu'il allait ĂȘtre fou de rage en rentrant, de maniĂšre comprĂ©hensible ! Alors je lui ai concoctĂ© un Wok Ă  la Robbie. L'ingrĂ©dient secret qui donne toute sa saveur : la dĂ©votion.

Je l'ai entendu rentrer tard, son plat était froid. 

R: "Heyyy bro!" Je l'avais attendu. Je le regardais les mains derriĂšre le dos.

L: "Robbie mon rat des prĂ©s
?" Il m'a regardĂ©, a couru vers moi et m'a enlacĂ© en pleurant. Ça je m'y attendais pas.

R: "Allons allons, tout va bien ! Je suis vraiment désolé, j'ai eu un
 accident"

L: "Raconte moi tout petit saligaud, j'ai retourné la terre entiÚre te retrouver !"

Ah, quel amour. 

R:"Je 
 Je me suis mis minable
"

L: "Hein? Mais pourquoi, quelque chose s'est passé, tu veux me raconter? Si qui que ce soit t'a fait du mal je vais le.."

R: "Non, non, t'inquiĂštes j'te jure!"

L: “J'ai chevauchĂ© mon tacot dans toute la citĂ© pendant des jours en espĂ©rant te trouver
” 

J’allais pas lui mentir, je voulais pas le faire. Alors je lui ai dit la veritĂ©.

L: “Je vois
 Cette Lither
 Je la dĂ©teste.”

R: “Hein? Mais pourquoi? Je suis content de m’ĂȘtre fait une amie Ă  la fac tu sais, vraiment.” 

L: “C’était irresponsable de sa part, comment est-ce qu’on pourrait ne pas faire plus attention au prince, que dis-je, au monarque que tu es!”

R: “Haha! Si je suis un monarque, je suis sa majestĂ© des mouches, et la dĂ©chĂšterie municipale mon royaume!”

L: “Quel poùte”, il m’a dit.

R: “Quel poùte
” Je lui ai dit tendrement. 

_

Une semaine a passĂ© sans que rien de plus trĂ©pidant ne se passe. Mais on a commencĂ© Ă  vraiment galĂ©rer, vous voyez. C’est alors que Leroy m’annonça la nouvelle.
“Rob mon abricot rigolo, tu vas jamais le croire!”
“J’aurais pensĂ© a un avis d’expulsion, mais vu le sourire sur ta face c’est sĂ»rement un truc moins craignos” Je lui ai rĂ©pondu en le regardant revenir de la boĂźte aux lettres avec un papier Ă  la main.
Il a ri.“T’es con! J’ai Ă©tĂ© acceptĂ© en restauration.”

R: “Quelle bonne nouvelle! Un pas supplĂ©mentaire dans le capitalisme, pour pouvoir vivre un peu plus convenablement.” J’ai dis avec dĂ©goĂ»t pour la sociĂ©tĂ©, mais soulagement pour notre situation.

L: “BĂ©mol
 C’est loin d’ici
 Je savais pas comment te l’annoncer mon frĂšre. Mais cet argent
 Il me servira en grande partie pour me soulager d’un poids, si tu vois ce que je veux dire.”

Je l’ai regardĂ© en retenant mes larmes. “FrĂšre, dĂ©jĂ  tu trouves un meilleur boulot pour amĂ©liorer nos conditions de vie
 J’ai pu poursuivre un de mes rĂȘves grĂące Ă  toi, alors fonce vil gredin, tu le mĂ©rites plus que quiconque ton bonheur.”

J’ai enlacĂ© cet espĂšce de gros ours qui remplissait mon cƓur et ma vie de toutes mes forces.

R: “Tu vas me manquer mon frùre
”
L: “Je reviendrais de temps en temps, Ă©videmment. Ce n’est que pour six mois mon blob en sucre.” 

Et quelques jours plus tard, j’ai pleurĂ© comme une madeleine en le voyant prendre la route dans son vieux pote rouillĂ©. Lui aussi. On s’écrirait et on s'appelerait souvent. 

Je me suis raccroché à mon gang, qui était maintenant composé de Lither, et Donny parfois, le séduisant aide infirmiÚre.
Un soir, Lither m’a alpaguĂ© comme un type chelou bourrĂ© l’aurait fait.
R: “Ca va Li’? t’étais pas en cours aujourd’hui.” Ses yeux rouges la trahissait; je savais que c’était pas les allergies. 

Li: "J'en ai trouvée de la bonne pas chÚre"

R: "Ah! J'ai promis Ă  mon ourson tendre que je ne recommencerais plus
 mais de la bonne pas chĂšre
? C'est le moment de consulter les diablotins sur mon Ă©paule."

Lither Ă©tait morte de rire alors que c'Ă©tait mĂȘme pas drĂŽle. Elle Ă©tait vraiment Ă©clatĂ©e. 

R: "Bonnn je te suis! Je suis faible. Et ça me manque."

Li: "Au pire on reverra notre beauuu Donny
 Ton beau Donny, hein, je te vois bien flirter avec lui, t'es cramé a 10km."

R: "Ça se voit tant que ça?" J'ai dit en riant. "Au moins j’envoie pas des signaux mĂ©langĂ©s!"

On s'est retrouvé dans un bar craignos, et en moins de temps qu'il ne faut pour le dire, le vide.

J'ai ouvert les yeux dans un endroit familier. J'avais un de ces maux de tĂȘte! Comme si un bƓuf m'avait foncĂ© droit dessus et explosĂ© la boĂźte crĂąnienne. Je devais vraiment pas ĂȘtre frais, mais au moins, j'Ă©tais le seul Ă©pargnĂ© du piteux Ă©tat de mon reflet.

Quelques heures plus tard, mes yeux se rouvrent sur le regard désapprobateur d'un ange. 

"Est ce que je suis au paradis?" Je lui ai sorti d'une voix qui voulait sortir une disquette, mais qui n'Ă©tait que fluette et Ă  peine audible.

D: "Non, cet endroit ce n'est pas vraiment le paradis, et je préférerais ne pas t'y revoir."

"C'est grñce à moi que des gens comme toi on ce job t'sais!" Je lui ai sorti en faisant de faibles doigts-pistolets, ayant eu l’illusion d’avoir fait la blague du siùcle.

D: "Ça c'est vraiment aussi nul que ceux qui disent ça en jetant leurs ordures Ă  la figure des Ă©boueurs."

R: “Sauf que ton ordure là c'est plutît un boomerang !”

D: “T'as du rĂ©pondant pour l'Ă©tat dans lequel tu es.”

L: “Comment va Lither?”

D: “Eh bah aussi bien que toi! SĂ©rieux les amis, arrĂȘtez. Je me fais du souci pour vous, je vous aime.”

Il fondit en larmes.

Avec le peu de forces que j'avais, je l'ai enlacĂ© pour le consoler. Nos visages se sont rapprochĂ©s, et on s’est embrassĂ©s. La vache, j’étais aux anges. Je lui ai caressĂ© la joue.

R: “On f'ra attention Donny. Pour toi.” 

J'ai arrĂȘtĂ©, j'allais mieux. C’était dur de mettre la dyspho de cĂŽtĂ©, c’est pas comme si je pouvais ignorer ma propre chair, alors je faisais au possible avec c’que j’avais. J'ai dĂ©cidĂ© de foutre cette fichue Ă©nergie dans l'amour que j'Ă©prouvais envers Donny Ă  la place. Ah que c'est fleur bleue! Mais que voulez-vous. Les sentiments nous font faire des trucs dĂ©biles. Comme lui dĂ©poser des fleurs roses et jaunes au bas de sa porte et des tableaux reprĂ©sentant ce qu'il aime, les p'tits lapins, les champs, et autres mignonneries.

Pour c'qui est des Ă©tudes, j'avais passĂ© trop de temps Ă  l'hosto et j'Ă©tais dĂ©faillant, alors j'ai arrĂȘtĂ©, Lither aussi comme on a glissĂ© sur la mĂȘme pente. Mais j'Ă©tais pas dĂ©primĂ©, j'allais fabriquer ma propre came et en vivre. Les gens aiment bien voyager, mais comme le monde est chiant et cher, ils prĂ©fĂšrent le voyage en poudre, en herbe ou en seringues. Sans me vanter, ça marchait bien! J'avais des aprioris comme tout le monde, mais j'aurais jamais cru que ça intĂ©resserait mĂȘme les gosses de riches. Cela dit, je suppose qu'pour eux c'est le contraire, ils ont tellement de possibilitĂ©s qu'ils savent plus comment ĂȘtre heureux. Ce qui me rĂ©jouissait dans cette histoire, c'est que je pouvais offrir des cadeaux Ă  ceux que j'aime. Ouais ouais, y'a un cƓur tendre derriĂšre ce p'tit punk cynique. Quand Leroy rentrera, je lui offrirai le restau le plus pĂ©tĂ© de la bourgade. 

Plus de temps libre et moins de stress, j'avais pas envie de retourner aux Ă©tudes. Je pensais que ça me permettrait de passer plus de temps avec Donny et Lither, qui Ă  ce stade Ă©taient les veines de mon sang. Malheureusement, le temps Ă  passĂ© et j’ai eu l'impression que c'Ă©tait l'hĂ©morragie, pour filer la mĂ©taphore, et mon bel infirmier n'avait pas l'air d'avoir envie de rĂ©parer les pots cassĂ©s.

Alors, on s'est Ă©loignĂ©s. Ça m'a brisĂ© le cƓur, mais y'a un moment ou faut arrĂȘter de courir aprĂšs les gens, surtout lorsque eux, ils courent pas aprĂšs vous.

Ces soirĂ©es oĂč j'Ă©tais pas invitĂ©, ces sorties ou j'etais pas de la partie
 mon absence avait l'air de dĂ©ranger personne. MĂȘme cette fois oĂč j'allais pour leur dire bonjour en les apercevant devant, et que Donny Ă  dit a Lither qu'il trouvait ça amusant de me voir isolĂ©, ce Ă  quoi elle a ri en disant que j'Ă©tais un sale type louche et toxico. Ils Ă©taient trop plongĂ©s dans leur dĂ©lire pour se rendre compte que je marchais derriĂšre eux. Je me suis arrĂȘtĂ© et j'ai reculĂ©. Je suis parti sans ĂȘtre remarquĂ©, comme un fantĂŽme. En traversant le pont j'avais la tĂȘte qui tournait. Et je promet que j'Ă©tais sobre. Du moins pour l'instant. J'avais putain de mal au tripes. Je me suis enroulĂ© sur le sol comme un cloporte alors que j'Ă©tais Ă  deux pas du hangar. Et je me suis mit Ă  chialer comme une merde. Il Ă©tait beau, le Robbie "fort et indĂ©pendant".

Les jours qui ont suivi ont été durs, mais je continuais, pour lui, je restais fort, pour notre avenir. Il était hors de question que mon frÚre rentre et tombe sur une loque endettée. Alors j'ai bougé mes fesses de mollusque et j'ai carburé !

Enfin, il était de retour. 

L: "Mon ange des ßles !" 

Il brandit ses bras et me souleva en me serrant tellement tendrement que je me serais laissĂ© casser les cĂŽtes avec plaisir. Je lui ai tout racontĂ©, il avait l'air aussi bouleversĂ© que moi alors qu’il Ă©tait pas dedans. Ce frĂšre empathique est un don du ciel. 

R: "J'men fous d'eux tu sais, je perdrais plus mon temps avec. Tout ce qui compte c'est toi, c'est notre avenir."

Chose promise, chose dĂ»e, je l’ai invitĂ© dans un restau super prout prout. Je vous raconte pas la gueule que faisaient les costard cravates en nous voyant lĂ , on sentait qu’on faisait tĂąche, et ça nous faisait mourir de rire.

L: “T'aurai pas dĂ»! Gros bĂȘta va.”

 R: “Je fais toujours des trucs bĂȘta pour les gens que j'aime!”

______

Comme si l'avenir Ă©tait linĂ©aire et le monde Ă©troit, quelques jours plus tard y'a une fille qui s'est ramenĂ©e au hangar. À ma grande surprise c'Ă©tait pas de la beuh qu'elle cherchait, mais moi. Elle Ă©tait grande et mince avec les cheveux bicolores. Une personne de goĂ»t assurĂ©ment.

S: "Désolé on se connait pas, je m'appelle Sorail. Je vais aller de but en blanc, je n'apporte pas de bonne nouvelles, et j'ai pensé que ça serait bien que tu sois au courant."

R: "Yo. Dit m'en plus?” j'Ă©tais inquiet, les bras croisĂ©s, j'ai levĂ© un sourcil.

S: "Je
. Je suis l'ex de Lither."

Mon sang à tourné quand elle a dit ça, mais la curiosité n'était toujours pas satisfaite. 

R: "Elle t'a pas peinte sous un beau jour tu sais, tu veux quoi ? Si c'est du drama, elle comme toi, vous pouvez retourner chez vous.”

Leroy Ă©coutait attentivement Ă  cĂŽtĂ©, mĂȘme s' il faisait mine d’affuter ses couteaux.

S: “Ce n'est pas pour t'attirer des ennuis, mais elle, son pote aux cheveux roses et jaune et leurs copains respectifs parlent de te faire des crasses, à toi comme à moi.”

R: "Ah ouais? Et comment tu sais ça ?”

S: "J'avoue que je le sais de maniĂšre pas trĂšs honnĂȘte, mais au vu de ce que j'ai dĂ©couvert franchement
 Quand on Ă©tait ensemble Lither et moi, j'avais prĂ©vu de lui faire la surprise de dĂ©mĂ©nager Ă  cĂŽtĂ© de sa chambre d'appart. Entre temps on a cassĂ©, mais mon bail Ă©tait dĂ©jĂ  signĂ©. Elle sait pas que je vis juste Ă  cĂŽtĂ© et que j'entends pratiquement tout Ă  travers le mur, on se croise jamais."

En lui demandant quelques détails, je réalisais de plus en plus que c'était la vérité. 

R: "Lither t'avais toujours dĂ©crite comme une connasse sans coeur et toxique
" 

S: "Elle a un trouble borderline, c'est trĂšs dur Ă  vivre, autant pour elle que pour ceux qu'elle aime. Elle a une vision dĂ©formĂ©e et exacerbĂ©e de la rĂ©alitĂ©, et Ă  des sautes d'humeur trĂšs violentes, agit de maniĂšre trĂšs instable avec beaucoup de manipulation Ă©motionnelle, et plus la relation est profonde, pire c'est. Cette relation m'a dĂ©truite complĂštement
" 

Ça se voyait Ă  son regard vide et fatiguĂ©, c'Ă©tait comme si son Ă©nergie vitale avait Ă©tĂ© aspirĂ©e hors d'elle. Ce que j'avais vĂ©cu et cette dĂ©couverte de la vĂ©ritĂ©, sur tous les mensonges que m'avait racontĂ© Lither
 Tout etait enfin clair. Et Sorail avait de quoi prouver la majeure partie de ce qu'elle avançait, et tout prenait son sens. Ce que me disait Lither Ă©tait souvent vague et sensationnaliste, et voilĂ  que j'avais en face de moi la piĂšce manquante : la raison. On a passĂ© la soirĂ©e lĂ  tous les trois le soir, j'Ă©tais sur le cul. C'est l'effet que ça fait de rĂ©aliser qu'on a donnĂ© son cƓur et son Ăąme Ă  des branquignoles. MĂȘme Leroy en revenait pas. Elle nous a racontĂ© tout ce qu'elle lui a fait subir dans le cauchemar qu'avait l'air d'ĂȘtre leur relation. 

Le matin suivant, on l'a remerciĂ© et on s'est dit de rester en contact au cas oĂč des magouilles se trameraient. Le truc qui me concernait Ă©tait encore trop flou, Ă  part des vannes, des insultes et des menaces dans l'air Ă  notre Ă©gard, y'avait, heureusement, encore rien de concret.

Leroy était fou de rage, un vrai taureau. 

L: "Si une seule de leur sales paluches ose se poser sur mon prince, la tĂȘte de ma mĂšre je leur broie la gueule."

R: "Je suis reconnaissant envers toi, tu sais, t'es tout ce qui compte pour moi. Ça me fait mal c'est vrai, ça va ĂȘtre dur, mais je veux absolument aller de l'avant et me focaliser sur ce qui est vraiment important. Maintenant qu'on a le temps et l'argent, et si on concretisait notre projet musical?"

L: "J'admire ta rĂ©silience, mais sache que mon offre sera valable Ă  jamais. Ça fait longtemps que je n'ai pas touchĂ© ni Ă  la gratte ni Ă  la batterie, t'as raison. Frapper des gueules ça me dĂ©mange, mais frapper un tambour c'est moins illĂ©gal et plus productif.”

R: "Il nous faut un nom!"

On a Ă©clatĂ© de rire avant mĂȘme de proposer nos conneries.

"Guerilla pas belle"

"PlanĂšte oinj"

"Kicked out sins" 

"J'ai drop l'univ pour la musique"

"Un pourboire svp!"

Quelle bande de rats. 

L: “Ça me rappelle le mioche psychopathe de mes voisins qui foutait des pĂ©tards dans la gueule des rats pour les voir exploser.”

R: “Heureusement qu'jexplose pas quand j'en pince un entre mes lùvres.”

L: “Les rats explosifs, c'est pas mal non? Les nuisibles que la sociĂ©tĂ© aimerait bien radier. Et qu’ils aimeraient bien faire taire!”

R: “Vendu! On sera les rats explosifs.”

On dirait le dĂ©but d'une comĂ©die musicale Ă  deux balles qui finit dans la gloire, le succĂšs et la coke. On n'a pas fini un seul son et c’était franchement mĂ©diocre, mais on s'amusait bien, c'est tout ce qui comptait.


L’étĂ© venu, j’ai eu envie de chercher des bricoles dans la brocante de la ville. Mes bĂątons Ă©taient vieux et pĂ©tĂ©s aussi. C’est une drĂŽle de pĂ©riode, l’étĂ©, pleins de prolos se rendent compte qu’ils aiment plus leur travail, alors ils pĂštent un plomb et dĂ©missionnent. 

Attends je rĂȘve
. J’ai dĂ» me frotter les yeux dix fois, et je me les serais passĂ© Ă  l’eau de javel si j’avais pu. 

Y’avait les quatre dindons sur un stand, qui vendaient tout ce que j’ai donnĂ© et fait pour Donny. Je les entendais rire en disant que s’il voyaient Sorail, ils allaient lui renverser le stand dans la gueule. Ils voyaient mĂȘme pas que j’étais plantĂ© lĂ , abasourdi de stupeur.

J’me suis secouĂ©. Et vous savez Robbie quand il se secoue, il part au quart de tour. Cela dit c’est facile de faire passer quelqu’un pour un hystĂ©rique au moment oĂč il craque sur le devant de la scĂšne, aprĂšs maints coups derriĂšre les rideaux. Et pourtant, j’ai essayĂ© de rester calme. Au dĂ©but.

R: “Hello DONNY
 Pas mal les tableaux, dis donc, je me demande qui les à faits.” 

“Je me demande bien en effet, hahaha!” me jeta-il avec le regard le plus malicieux du monde. Ils se sont mit Ă  Ă©clater de rire en me regardant. Putain de merde, la derniĂšre fois que je m’étais senti ainsi c’était au collĂšge. Le mec Ă  Lither m’a foncĂ© dessus et m’a fait tomber. Le mec Ă  Donny m’a jetĂ© un coup de pied. J’étais fou de rage. J’ai arrachĂ© un tableau du stand.

R: “T’as pas le droit de t’accaparer mon travail et d’en faire ce que tu veux, sale voleur!”

“C’est toi qui a pas le droit connard! rend moi ce putain de tableau, c’est le mien! tu me l’as offert! Casse toi et arrĂȘte un peu de vouloir faire ton intĂ©ressant!” 

Son mec renchĂ©rit: “ ouais attends je vais appeler les flics.”

Mon cerveau a vrillĂ©. J’suis pas ACAB pour rien, il fait ça et je suis bon pour la taule. Et avec leurs dĂ©gaines bien propres, les poulets auraient pas hĂ©sitĂ© avant de m’embarquer, on leur donnerait le bon dieu sans confession. Pas Ă  moi. Si je m’étais vu, je me serais giflĂ©, mais je n’avais d’autre choix que de baisser mon froc, autrement dit de les implorer de ne pas le faire. Heureusement pour moi, il a renoncĂ©. 

Je suis reparti les mains dans les poches, traumatisĂ©, avec en arriĂšre plan leurs rires de hyĂšnes que je ne distinguaient presque plus, comme n’importe quel bruit, tant mes oreilles bourdonnaient. 

A la maison je me suis affalé sur le canapé. 

R: “Leroy
 Je voudrais qu’on dĂ©mĂ©nage, je me sens pas bien ici.” 

L: “Robbie mon choupichou, je t’aime beaucoup mais je suis bien dans cette ville, j’ai peut ĂȘtre l’occas de trouver du boulot Ă  la rentrĂ©e. Si on se casse faudra tout reprendre Ă  zĂ©ro et prĂ©parer du temps pour le dĂ©mĂ©nagement.

Je suis juste sorti et lui ai ordonnĂ© de ne pas me suivre. Genre fĂ©roce. J’ai hurlĂ©, j’ai fracassĂ© tout ce que je pouvais Ă  la dĂ©chetterie. J’étais fou furieux. Je me suis blessĂ© en balançant du verre. Puis encore une fois je me suis rĂ©tamĂ© par terre comme une merde en chialant. PathĂ©tique, mais qu’est-ce que je pouvais faire de plus? rien. J’ai cachĂ© tout ça a Leroy. J’ai bandĂ© ma main et enfilĂ© mes mitaines. 


Je lui ai quand mĂȘme racontĂ© ce qu’il s’était passĂ© quelques jours aprĂšs. Il Ă©tait furieux et voulait tout casser Ă  son tour, mais je lui ai dit que ça n’en vallait pas la peine. 

L: “On s’en ira de ce taudis va, un jour.” 

Je lui ai rĂ©pondu d’un sourire.

Il m’a emmenĂ© en haut d’une colline avec un p’tit dĂźner pour me changer les idĂ©es. On s’est allongĂ© dans l’herbe en regardant le ciel, ouais, comme dans ces vieux films gnan gnan Ă  l’eau de rose. 

R: “Est-ce que parfois, tes parents te manquent?”

L: “ Cette conne qui me sert de mùre me manque pas le moins du monde. Si j’avais besoin de quelqu’un qui m’insulte et m’humilie, je me mettrais au BDSM. Mais c’est pas mon kiff. Et toi ratounet?” 

R: “Tsk. pas le moins du monde non plus. De toute maniùre c’est toi, ma vraie famille.”

L: “Je le pense aussi, my love, mon zùbre des savanes luxuriantes.” 

__________________


Les jours passaient et je sentais Leroy fatiguĂ©. Parfois, il s’en allait un week-end sans me dire oĂč. Et pis il revenait comme si de rien n’était. 

Les mauvaises nouvelles s'enchaßnent, mon école de chimie voulait définitivement plus de moi. 

“J’peux toujours continuer Ă  fabriquer et vendre de la drogue avec ce que j'ai appris! Tu penses quoi d'un foutu jardin de marie-jeanne? On pourra toujours planter des tournesols pour Ă©quilibrer l'illĂ©galitĂ© de cette idĂ©e.” 

Leroy: “on va trouver une solution, ça va aller, ne t’en fais pas.” 

Un soir, il rentre de son week-end mystérieux, avec un gros sourire sur les lÚvres. 

L: “Oh Robbie, tu vas pas le croire, j’ai revu ma mĂšre et elle a changĂ©! Elle a pris ma dĂ©fense devant toute la famille!”

R: “Tu as quoi?!”

L: “Personne n’avait jamais fait ça pour moi auparavant!”

R: “attends je rĂȘve, tous ces week ends, tu allais voir cette espĂšce de mĂ©gĂšre lunatique qui t’insultait et te piquait ton fric?!”

L: “Quoi?! comment tu peux dire une chose pareille, tu ne la connais mĂȘme pas!”

R: “En effet, je ne sais ça d’elle qu’à travers toi! Je me fais du souci pour toi, ca me paraüt bien naïf
”

L: “J’ai abandonnĂ© ma vraie famille, mon vrai frĂšre pour te suivre dans tes dĂ©lires!”

R: “
Hein? Mais ça n’a aucun sens
”

L: “tais toi, arrĂȘte de me parler. “

Et juste comme ça, il a pris sa caisse
. Et a roulĂ©. J’ai tentĂ© de lui courir aprĂšs, mais qu’allaient bien pouvoir faire mes deux pauvres gambettes.

J’ai passĂ© la pire semaine de ma vie je crois. Je bouffais plus. Le garage Ă©tait un vrai taudis. J’avais pas une seule nouvelle. 

AprĂšs cette semaine , j’ai dĂ©cidĂ© de partir Ă  sa recherche. Je marchais pas droit, mais je marchais. Comme par miracle, il Ă©tait lĂ , Ă  remplir son tacot dans sa station habituelle.

J’ai couru de toutes mes forces, une lettre que j’avais Ă©crite pour lui en main. Je voyais pas ses yeux Ă  travers ses lunettes. Il balaya la lettre de la main.

L: Je vais pas la lire. Je veux pas vivre dans la haine comme toi, Robbie. Mais tu sais quoi? Ça n'a plus aucune sorte d’importance. C’est pour ça que je me suis barrĂ©. C’est pas ma mĂšre, ni mon frĂšre, c’est juste toi. Comment j’ai pu faire confiance en quelqu’un qui prend un plaisir malsain Ă  harceler les gens? Ça faisait des mois que j’avais peur de toi. Peur qu’une dispute ainsi explose et que tu tentes de me pousser au suicide ou que tu cherches Ă  te venger de je ne sais quelle horrible maniĂšre, en analysant mes faiblesses pour mieux me blesser. Tenir tes potes par les couilles ainsi
 C’est beau, bravo. Maintenant laisse moi tranquille et ceux que j’aime aussi, ou j’hĂ©siterais pas Ă  appeler les flics. Je veux juste tourner la page. 

AprÚs quoi il est remonté dans sa caisse et a disparu. 

Le temps et l’espace semblaient se tordre devant moi. Combien de temps j’ai passĂ© recroquevillĂ© dans mon garage, seul, dans la saletĂ©, combien de journĂ©es, de soirĂ©es, de semaines, de mois sans ĂȘtre sobre? Un an, j’ai passĂ© Ă  ruminer, Ă  haĂŻr le monde, et Ă  vouloir que la prochaine dose soit lĂ©tale. AprĂšs un an, je suis allĂ© au parc, instinctivement. Celui prĂšs de chez Donny. y’en avait pas trente-six non plus. J’aurais peut-ĂȘtre dĂ» partir, ou peut-ĂȘtre que le destin est bien fait. J’ai aidĂ© un p’tit pigeon hors de la bouche d’un chat domestique, et ça m'a fait sourire en l’espace de quatre secondes. Puis je les ai vu. Eux non, j’étais derriĂšre les fourrĂ©s. Mais je les ai vu. Donnie, Lither, Leurs mecs et
 Leroy.

Qu’est

ce 

qu’il 

foutait 

là 

avec
. Eux qui plus est
?

Ils souriaient. Ils partageaient un café, une bierre. 

Comment pouvait-il ĂȘtre si serein avec des gens comme ça? En ayant vu une menace en moi
 Mais pas en eux? 

Ça n'avait aucun sens. Mais est-ce que c’était pas plus mal comme ça
? Que rien n’aie de sens
? Je ne savais plus ce qui Ă©tait prĂ©fĂ©rable. Je m’en fichais. c’était
. La goutte de trop. Je suis parti comme je suis venu. Je ne croyais plus rien. Rien n’avait d’importance Ă  prĂ©sent. 

J’ai grimpĂ© dans le premier train que j’ai vu. J’ai tout laissĂ© derriĂšre moi, tout. Un clodo chanceux bĂ©nĂ©ficiera peut-ĂȘtre du taudis auquel j’ai habitĂ© si tant est que l’air y soit encore respirable. j’ai juste embarquĂ© une sacoche contenant mon tiquet Ă  usage unique vers un endroit plus paisible. 

Les jambes au vent, j’ai fredonnĂ© un air.

“Why did you decide
 Your dog was a wolf, your dog was a wolf
 Why did you leave him
 On the side of the road, on the side of the road
” 


Certaines personnes vous diront que c’est mieux d’avoir aimĂ© et perdu. Conneries. VoilĂ  oĂč ça m’a menĂ©. Bien sĂ»r, vous rierez, vous aussi, en disant que c’est de ma faute, que je suis trop sensible, que je veux faire mon intĂ©ressant. Je n’en ai que faire. BientĂŽt les rires ne m’atteindront plus. Plus personne pour rire sur mon corps agonisant. Laissez-moi reformuler; je ne serais plus lĂ  pour l’entendre. A cette pensĂ©e, un sourire sincĂšre s’est dessinĂ© sur mon visage. C’est fou que la vie vous pousse Ă  bout au point que la seule chose qui vous fasse sourire d’un sourire authentique, c’est l’idĂ©e de la quitter
.

Je crois pas au karma, la roue tourne et toutes ces conneries. Le karma marche Ă  l’envers pour moi.Plus j’essaye, plus je m’en prend dans la gueule. Et j’ose mĂȘme pas imaginer Ă  quel point ça serait pire si je me contentais d’ĂȘtre une vraie saloperie. Les gens ont le droit de faire les pire merdes au monde, c’est pas grave, puisque c’est juste Robbie qui en pĂątis! Mais malheur, s’il ose se dĂ©fendre, on le foutra au bĂ»cher, en hurlant au monstre. Je suis toujours le seul Ă  payer les consĂ©quences de mes actions. 

J’ai du mal Ă  me remĂ©morer les choses correctement, ça ne sert Ă  rien de ruminer des choses qui n’ont aucun sens de toute maniĂšre, ça ne leur en trouvera pas un, magiquement. Je me souviens d’une fameuse menace envers Leroy dans la plaisanterie
 Que s’il m'abandonnait, j'irais pisser sur le siĂšge de son tacot. MĂȘme pour si peu
 chaque matin il se rĂ©veillera avec son siĂšge intact. 


J'aperçois les controlos au loin. Ils m'attrapent par le col comme un vulgaire torchon en me secouant, avant mĂȘme de me demander mon ticket. c’est parce que j’ai une gueule d’arabe, ou une gueule de punk? Combo perdant apparemment. 

Ils m’ont filĂ© une amende et m’ont jetĂ© au prochain arrĂȘt. Je leur ai gueulĂ©:” je vous le rembourserai avant ma mort quand j'aurais de l'argent... avec un peu de chance!"

Quand on est comme moi, tout paraĂźt Ă  une Ă©chelle plus haut. Et je dis pas ça car je mesure 1m50 Ă  tout casser. Les gens d’en bas ont tout version plus compliquĂ©. C’est la fameuse Ă©chelle des privilĂšges. La justice n’est pas juste, et cherche Ă  Ă©liminer ceux qui sont tout au bas de ses critĂšres. Alors je n’ai que moi. Je n’ai toujours eu que moi, de retour au dĂ©part. Je pourrais tout recommencer
 Mais je n’ai pas envie. On peut pas recoller un pot cassĂ© Ă  l’infini. Tout est si
 instable, effrayant. les gens sont instables et effrayants. On n’a aucun contrĂŽle sur leur bon vouloir ni sur leurs actions. Ils mentent, sont profondĂ©ment stupides, infiniment Ă©goĂŻstes, fous
 La vie est un puits de folie qui ne finit jamais de se creuser, mĂȘme quand on croit qu’on en a vu le fond.

Maudits soient les gens qui essaient de chercher une morale Ă  tout. Vous pensez qu’il y a une morale Ă  cette histoire? Quelle genre de morale grotesque ça serait? A part “abandonne”? Vous inquiĂ©tez pas, j’y viens
 Je maudis vraiment les gens qui esssaient de trouver des putain de morales et des raisons derriĂšre chaque chose, comme s’ils essaiyaient de trouver du sens dans des choses qui n’en on pas. L’humain Ă  toujours fait ça. La vie c’est de la merde puis aprĂšs tu meurs, c’est tout. Le plus tĂŽt le mieux. C’est ça la rĂ©alitĂ© de laquelle ils essayent de s’échapper. 

Ils diraient que les mauvaises personnes mĂ©ritent de mauvaises choses. P’tĂȘtre qu’au fond, je vis dans le dĂ©ni et je mĂ©rite tout ce qui m’arrive. Woah. J’avais jamais touchĂ© le fond comme ça. J’avais pas grand chose, sinon comme seule fiertĂ© mon estime de moi. Mais c’est finito, j’ai plus rien, je sais plus qui je suis, je sais plus ce que je vaux. Si il faut Ă  tout prix trouver un sens aux Ă©venements, penser que je le mĂ©rite car je suis une sombre merde au fond, ça me va comme conclusion. Je pense que je suis pas fait pour la vie, pour ĂȘtre aimĂ©. C’est gravĂ© en moi et tout est vouĂ© Ă  faner et Ă  mourir autour de moi. C’est ça, ma destinĂ©e. Je suis bien plus douĂ© pour ĂȘtre dĂ©testĂ©, et ce depuis que je suis nĂ©. Certaines personnes prĂ©fĂšrent se dĂ©douaner Ă  l’infini en blĂąmant les autres, d’autres se blĂąmer elles mĂȘme. Je sais pas de quel cĂŽtĂ© me positionner. Je veux juste arrĂȘter de penser. De ressentir. J’ai pas le droit d’aller mieux. Mes rĂȘves sont inaccessibles et ce poids qui m’encombre au torse
 Personne de moins de milliers de sous pour me le retirer. Je suis condamnĂ©.

J’avance. Ce coin ou on m’a jetĂ© n’est pas trop mal. Il y a une plage. J’aime bien. Personne aux alentours. C'est une plage du nord, il y fait froid et humide. J’enlĂšve mes chaussures et je m'assieds au bord de l’eau. C’est vraiment une belle derniĂšre journĂ©e


Je pense que j'aurai prĂ©fĂ©rĂ© ĂȘtre nĂ© riche ou ne pas ĂȘtre nĂ© du tout. Ca peut paraĂźtre hypocrite venant d'un type qui gueule “manger les riches” h24. Mais y'a pas d'espoir pour les gens comme nous, qui partent de rien, faut arrĂȘter de se voiler la face. De faire croire aux rejetons comme moi qu'on sera autre chose que des putes et des dealers. Des maçons mal payĂ©s au mieux. Pas de futur pour les gens qui n'ont pas d'argent, car celui-ci construit le futur et fait tourner le monde. Ou peut-ĂȘtre que c’est juste moi; un sac de poisse ambulant. J'etais un pestifĂ©rĂ©, un punk, un trans, un rebelle, un mal aimĂ© de cette sociĂ©tĂ© de merde, mais au moins, je n'Ă©tais pas seul. Pourquoi la maniĂšre dont les autres me traitent doit avoir autant d'impact sur moi? Je suis juste la marionnette de leur bonne volontĂ©. Je hais ça. Je ne peux pas ĂȘtre heureux. Ça m'arrache la gueule de dire ça mais j'admets: Je dĂ©pends des autres, de leur regard, de leur bon vouloir, s'ils veulent bien me traiter. DĂ©cider de vivre ou mourir Ă  cause d'autres personnes
 est stupide n'est ce pas? Malheureusement je n'arrive pas Ă  faire autrement. J’aurais prĂ©fĂ©rĂ© ĂȘtre une pierre impassible mais je suis une satanĂ©e Ă©ponge pathĂ©tique. J'ai toujours vĂ©cu pour donner et je n'arrive pas Ă  vivre avec moi mĂȘme, je n'en ai ni la sagesse ni l'Ă©goĂŻsme... et encore moins l'amour propre.

J’ai essayĂ©. Au moins j’ai essayé  J’ai Ă©chouĂ©. 

j’entends une voix qui m’appelle au large
 Quelque chose qui voudrait de moi. Attends moi, je prends ma derniĂšre gorgĂ©e, je pose ma plume, la laissant au large, et j’arrive


-Robbie K.




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