Le journal de Kitty


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Twitwira
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3 years, 2 months ago
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Chapter 1
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Chapter 1


Environs un mois après mon arrivée

Le clerc qui m’a recueilli, pour me pousser à m’améliorer, m’a fait tenir un journal à partir du moment où j’ai commencé à maîtriser l’écriture. J’ai pendant longtemps gardé cette habitude, le plus souvent sur des feuilles trouvées ça et là, des papiers ramassés et amassés dans le vieux carnet qu’il m’avait donné. Ce dernier a, malheureusement, subit un incident aqueux qui l’a réduit à l’état d’une masse illisible, perdant les souvenirs conservés à l’intérieur. Par un hasard malencontreux, damoiselle Ronce a assisté à la scène et mon désarroi, je lui ais alors confié quelle perte c’était là pour moi et pourquoi je cherchais à ramasser ces pages pourtant perdues. Quelques jours plus tard, mademoiselle est revenue vers moi, me tendant un carnet neuf d’une qualité étonnante ainsi qu’une petite boite de bois avec une plume et un encrier. J’ai été très étonné de ce présent, car c’est une demoiselle très renfermée et je craignais surtout de l’avoir dérangé avec mes soucis. Qu’elle leur ait porté une telle attention me touche plus que je n’ose l’avouer et j’ai senti mes yeux brûler de larme face à ce présent.

Je n’ai pas l’habitude d’avoir un papier aussi somptueux entre ces mains et j’ai mis quelques jours à me décider d’annoter dedans, mais ne pas le faire serait aller contre l’utilité première de ce présent. Je vais commencer par résumer ce que j’avais noté dans mes pages perdues, pour ne pas risquer d’omettre ces choses à l’avenir.

  • Je ne parviens pas à me souvenir quand je suis né, j’ai dû mal à saisir la façon de compter des humains et la façon dont je devrais me situer de leur histoire. D’après le clerc, j’aurais plus d’une trentaine d’années, mais physiquement il me donnait dans la vingtaine et il était très surpris que mon corps ne mûrisse que peu (je suppose que c’est une part de ce qui a provoqué la haine envers moi ?).

  • Je me nomme Valor, c’est le nom dont je me souviens depuis le plus longtemps. Un nom donné par des humains très doux, qui aimaient moi, mes frères et mes sœurs d’un amour très sincère (de ce que je saisi de l’affection humaine, surtout pour les animaux). Je suis né chat et j’ai grandi au royaume de Lapis (aujourd’hui encore je me souviens du parfum de la mer, je dois avouer qu’il me manque quelque peu par moment).

  • Un jour, il y a eu un violent orage, des bruits sourds, un tonnerre étrange et une pluie de feu. Après ça nos humains ont disparu et nous ne les avons plus jamais revus. Les miens sont partis loin des terres devenues cendres et poussières, là où il y avait de la nourriture. Moi je suis resté dans ce qu’il restait de notre maison. Je n’avais, à l’époque, pas conscience de la mort, j’espérais juste revoir ceux qui nous avaient tant chéri et aimé. Bien sûr, ils ne sont jamais revenus.

  • J’ai attendu longtemps dans cette maison qui tombait en ruine, cette période est floue, obscure. Je me souviens d’un humain, un seul, pour être gentil avec moi. Je ne me souviens de rien de plus. Un nouvel orage a éclaté, différent des autres. Pas un orage de feu, un orage de pluie et de tonnerre… mais qui a voulu engloutir ce qui restait de mon toit. J’étais prêt à partir avec.

  • Je n’ai que peu de souvenirs de ce moment, de ce qui s’est passé ensuite. Je me souviens juste que j’avais mal, que les choses étaient difficiles, longues, mais qu’il y avait une personne pour m’aider : un clerc (un homme ayant dédié sa vie au culte). Il qui m’a raconté les choses : un éclair serait tombé sur le manoir, un éclair étrange, différent des autres, surement destiné à l’humain venu me chercher. Malheureusement, ma présence aurait altéré quelque chose, provoquer une anomalie mystique (liée à nos dieux). Je n’ai jamais réellement su quoi faire de cette information, je dois bien l’avouer, même aujourd’hui je ne sais pas du tout ce que cela signifie… à part que ma vie a totalement changée. Heureusement, cet homme était là pour me protéger, les gens du village se montrant très agressifs envers moi.

  • À la mort du clerc, je me suis retrouvé seul et la haine, la colère, de ces gens a éclaté. Je ne suis pas sûr de comprendre pourquoi, de quoi ils m’accusaient, mais ce sont, si mes souvenirs sont exacts, des choses qui m’ont souvent été reproché (la couleur grise de ma peau, les variations de mon pelage, mes yeux étranges, etc). J’ai fini par partir en quête d’un lieu où les pierres resteraient au sol, où les gens ne tenteraient pas de me faire du mal. Lapis a pourtant la réputation d’une ville pacifiste et de culture, de ce que j’ai ouïe dire par la suite, mais peu de gens ont été bienveillants envers moi …

  • Je ne saurais pas dire le temps qui s’est écoulé, c’est une notion avec laquelle je me débats encore aujourd’hui, mais finalement je suis arrivé au Royaume de Rubis avec une caravane de marchand. Lors du déchargement j’ai entendu rumeurs disant qu’on offrait gîte et couvert contre du travail au palais et malgré la réputation de l’Impératrice, j’ai tenté ma chance. Je voulais juste dormir quelques jours sous un vrai toit, avoir un vrai repas, rien de plus… je ne pensais pas que l’on voudrait me garder dans ces murs, je pensais qu’un étranger comme, qu’un être aussi différent n’aurait pas sa place longtemps dans le palais, même dans l’aile des domestiques.

  • Ma première rencontre fut le général Antarès Sköll (je crois qu’il y a le nom et le prénom, mais ces notions aussi j’ai encore du mal à les comprendre). Je cherchais l’aile où on avait livré les marchandises, endroit où il fallait se présenter pour l’entretien, quand sa main c’est abattu sur mon épaule. Il m’a nommé « camarade félin », et je ne suis pas sûr de la suite de ses propos, juste qu’il a fini par me demander de « faire mes preuves » après m’avoir mené dans un lieu sordide à l’odeur de métal et l’étrange peinture rouge. Je ne saurais dire comment, mais j’ai réussi à lui faire part des raisons de ma présence dans le dialecte le moins adroit que je n’ai jamais eu, du moins pas depuis mes premiers jours de revis. Je ne sais pas ce qui a fini par le convaincre, mais il m’a ramené aux cuisines et m’y a laissé pour que je puisse me présenter.

Je fais une parenthèse ici car après avoir écrit ces lignes, j’ai tourné et retourné plusieurs fois les choses qu’il m’inspire dans mon esprit et, même après quelques jours, je suis circonspect car incapable de comprendre. Il me fait peur, établissons ce fait, mais d’un autre côté il m’est difficile de détourner les yeux lorsqu’il est dans les parages, et il m’est déjà arrivé de me surprendre à le guetter au détour d’un couloir. Je ne sais pas quelle humanité m’agite en sa présence, mais cela m’est étrange.

  • Je ne sais pas si c’est mon escorte de la part du général, mon éloquence, ou simplement le fait de savoir tenir un balai et pouvoir grimper faire ménage en des zones hautes, dans tous les cas je fus accepté. Je chasse la poussière, les rats, les souris, les ombres, qui peuvent perturber les habitants du palais. Des missions simples, faciles à remplir, qui me donnent beaucoup de plaisir.

  • J’ai fait la rencontre de L’Impératrice : je nettoyais la salle de thé à son arrivée et je crois que j’ai eu de la chance, car apparemment mon prédécesseur n’a pas eu droit à son indulgence lorsqu’elle l’a surpris ici. Il y quand même des choses étranges, qui me perturbent entre ces murs. Des ombres, comme j’écrivais, mais aussi d’autres présences dont je connaissais déjà l’existence, mais qui semble se rassembler en ce lieux en grande quantité.

Si je me réfère au calendrier humain, je crois que ça fait un mois que je suis ici, la lune s’étend déjà arrondie une fois. Je trouve doucement ma place, je crois même que je commence à comprendre les conventions de ce royaume ! On m’a dit que si je travaillais convenablement, si je me montrais de confiance, je pourrais avoir une place avec les autres serviteurs. Pour le moment je suis logé dans une petite pièce collée à l’écurie, dans une couche pleine de paille chaude et douillette. Je suis le seul ici, mais la dame de maison qui m’a pris en charge à mon arrivée m’a dit que c’était la place des bêtes et je n’ai pas tellement eu le courage de m’opposer à elle : c’est une femme petite mais trapue, qui a quelque chose de terrifiant et mauvais dans le regard.

Je n’ai pas réellement d’embition, je désire juste un toit et des repas chauds, rien de plus, et pour le moment j’ai tout ceci ici. Cependant je suis inquiet : j’ai entendu des mots, des bruits de couloir, des murmures qui me font craindre pour la santé de l’Impératrice. Je crois qu’ils parlaient du thé, un thé spécial mais dangereux. J’ai décidé de laisser traîner mes oreilles et ma truffe, même si je me fais gronder parfois parce que je suis où il ne faut pas, ou que l’on m’accuse de tirer au flan … je ne veux pas qu’il arrive du mal à celle qui prend tant soin de moi.