N'aie pas de regret


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Chapter 2
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La princesse Éclat et ses compagnons poursuivent leur route à travers la région de Montfran et tombent sur la ville de Maygate. Ses habitants sont régulièrement victimes des attaques de dragons et accueillent très mal l'arrivée de nos voyageurs. Fort heureusement, le comte Edmund intervient et les invite dans son château. La princesse accepte son hospitalité uniquement pour pouvoir enquêter sur ce dragon, car il est inconcevable pour elle qu'il attaque une ville sans raison...

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La lettre


Après le départ de Lune et Kalika, Éclat dicta rapidement une lettre pour son frère avant d’invoquer l’oiseau messager. Elle voulait simplement le tenir informé des derniers rebondissements. Après la disparition du messager, elle soigna rapidement son bras. La douleur s’estompa progressivement, au fur et à mesure que la magie faisait effet. Une fois que la plaie fut complètement refermée, elle laissa échapper un soupir.

— Tout va bien ? s’inquiéta Arlette en la voyant si taciturne.
— Juste un peu de fatigue, la rassura-t-elle.
— Rien de plus normal ! Depuis combien de temps ne vous êtes-vous pas posée ? Vous forcez trop ! Je vous l’ai déjà dit !
— Trop de dragons ont encore besoin de mon aide.
— Ne pensez-vous pas en avoir déjà fait assez ? Voilà près de six ans que vous parcourez le monde ! Vous en avez déjà aidé tellement ! Il serait peut-être temps de penser à vous.

Éclat tendit sa main devant elle et fit bouger ses doigts, comme si elle tentait de les voir.
Arlette sentit son cœur se pincer.

— Cette quête me rend heureuse, avoua la princesse. Pour la première fois de ma vie, je me sens vraiment utile. Grâce à moi, tous ces dragons possèdent désormais un foyer, un endroit sûr où ils ne seront plus persécutés. Même si cela peut sembler peu de chose à certains, j’en suis fière. Mais je mentirais en disant que je trouve cela facile et, certains moments, je ressens tout le poids de mon handicap. Comme tout à l’heure…

Elle porta la main à ses yeux, dans un geste qui fut autrefois un réflexe. Il y avait longtemps que son handicap ne l’avait gênée à ce point.

— Si j’avais pu voir, nous ne serions pas ici, chuchota-t-elle.
— Allons, cet interlude ne peut que vous faire du bien ! la rassura la servante. Il y a longtemps que nous n’avons connu le luxe d’un château. Essayez d’en profiter !
— Je m’inquiète pour les autres, j’aimerais être avec eux.
— Ils s’en sortiront ! Soyons honnête : avec ou sans vision, vous n’auriez pu les accompagner. Votre devoir de princesse vous oblige à honorer notre hôte de votre présence, et il y a fort à parier que Lune et Kalika seront plus rapides sans humain pour les entraver.

Éclat esquissa un faible sourire.

— Tu as sûrement raison, admit-elle.
— Nous ferions mieux de nous concentrer sur l’essentiel ! J’ai entendu dire que ce cher comte prévoyait un bal en votre honneur ce soir !
— Un bal ?! s’étonna la princesse. Il y a bien longtemps que je n’ai plus dansé.
— Ce genre de chose ne s’oublie pas ! Vous verrez ! Je suis certain que cela vous fera le plus grand bien. En revanche, j’espère ne pas avoir oublié comment faire une coiffure élaborée…

Éclat sourit, plus franchement cette fois.

— Je te fais confiance, déclara-t-elle.

Une heure plus tard, Arlette tentait pour la quatrième fois de faire tenir un audacieux entrelacs de tresses sur le crâne de la princesse quand un crépitement déchira l’air. Éclat se redressa, pendant que la servante courbait la tête au passage de l’oiseau. Celui-ci décrivit un large cercle avant de venir se poser délicatement sur Firmin, le seul n’ayant pas bougé. Celui-ci détacha prudemment le message avant de le tendre à la servante.

— Alors ! s’exclama-t-elle. Voyons voir ! Ma chère sœur, je suis heureux d’avoir de tes nouvelles. J’avoue avoir été étonné en lisant ta lettre : il est vrai que le comportement de ce dragon semble des plus étranges. Néanmoins je ne m’inquiète pas, je sais que tu sauras comment t’y prendre ! Tu as toujours eu le don d’adoucir ces créatures. J’ose espérer que tu profiteras de ton séjour chez le comte. Bien tendrement, Zéphir.

Éclat soupira, déçue. Elle avait espéré que son frère lui donnerait quelques pistes concernant le dragon.

— Il y a un post-scriptum, reprit la servante. Je me permets de joindre à cette lettre quelques courriers qui sont arrivés récemment pour toi. J’ose espérer que tu trouveras le temps de les lire.
— Quoi ? demanda Éclat. Quels courriers ?

Arlette lut rapidement quelques feuillets avant de ricaner.

— Du peu que j’en voie, il s’agit de demandes en mariage ! s’exclama-t-elle.
— Quoi ?! Encore ! Quand cela cessera-t-il ?
— Vous voulez que je vous les lise ?
— Plus tard, je n’ai pas le cœur à ça pour le moment, soupira la princesse. Range-les dans ma sacoche s’il te plait.

La servante s’exécutait quand la porte s’ouvrit.

— Tu ne devrais pas traîner dans les cuisines Carsius, réprimanda gentiment Éclat.

Elle entendit le dragon s’arrêter.

— Comment avez-vous su ?! finit-il par s’exclamer.
— Tu sens le rôti et le chocolat, lui apprit tranquillement la princesse, réprimant un sourire.

Elle l’entendit s’esclaffer.

— À chaque fois ça m’épate ! lança-t-il en se laissant tomber sur un divan. Tiens, qu’est-ce que c’est ?

Il venait de voir les enveloppes dépasser du sac de la princesse. Insensible au cri courroucé d’Arlette, il prit les feuillets et les parcourut rapidement.

— Non ?! Des demandes en mariage ?!
— Repose ça, s’il te plait, ordonna Éclat.
— Lune est au courant ?
— Ni Lune, ni Kalika. Je ne vois pas en quoi cela les intéresserait, répondit la princesse, perplexe.

Carsius ricana. Lui, au contraire, avait une idée parfaitement fixée sur la question.

— Apparemment, ils préparent une petite fête pour ce soir, leur apprit-il en rangeant les documents.
— Oui, Arlette me l’a déjà dit.
— Alors c’est pour ça que tu as cette….chose sur la tête ?
— Apparemment c’est la dernière mode, avoua Éclat en riant.
— Dites le moi si je dérange, ironisa Arlette. Cela fait une heure que je m’acharne dessus !
— Personnellement, je trouve Éclat plus jolie en étant naturelle.
— C’est aussi mon opinion, rétorqua Firmin. Toutes ces tresses… non vraiment ce n’est pas elle.

Prise en défaut, la servante poussa un soupir à fendre l’âme. Éclat lui tapota gentiment la main.

— Tu vas y arriver, lui souffla-t-elle.
— Évidemment que je vais y arriver ! se reprit la femme, son énergie retrouvée. Maintenant Messieurs, veuillez sortir ! J’ai une princesse à transformer !